L’intérêt de ce drame en 3 actes est surtout, semble-t-il, dans la manière dont les rôles sont envisagés :  d’abord une liste des personnages, en évocation dramatique et historique en trois actes, en vers puis un prologue avec le vendredi de la Pâque juive, à l’aube, dans les appartements de Claudia Procula.

Les protagonistes tombent abruptes, rien n’indique leur âge, leur caractère, leur profession, leurs sentiments. Aussi indéterminés que le chevalier des romans de la Table-Ronde qui quitte son château inconnu et part à la recherche d’aventures. Ils ne savent rien de cet homme qui vient d’être arrêté.

Le milieu où ces mortels vivent est au contraire bien précis : Ponce Pilate est le Gouverneur de Judée.

Nous voyageons avec Caïphe, grand prêtre du Temple de Jérusalem, membre « majoritaire » du Sanhédrin, en Galilée.

Alain DIDIER

L’auteur,  juriste est né en 1950. Il est mon cousin et écrit depuis 40 ans pour le théâtre dans la plus pure tradition française de l’alexandrin.

Cet écrivain sera peut être un jour assassiné pour avoir produit cet ouvrage d’allure si innocente.

En explorant sa bibliothèque, on identifie les sources qui ont inspiré le livre magique.

Parmi elles, Alain Didier retrouve trace de l’ancien et du nouveau Testament, de la référence traditionnelle aux évangiles, des visions et révélations d’Anne-Catherine Emmerich sur la vie de Notre Seigneur Jésus-Christ (Téqui, 1995), religieuse de Westphalie (1774-1824) et aux Biographies évangéliques de Mgr Gaume.

Et le profit qu’en tira Mel Gibson de ces révélations dans son film La Passion du Christ (2004) qui connut un succès mondial.

Puis l’évangile selon Pilate d’Eric-Emmanuel Schmitt qui fut adapté à) la scène, les mémoires de Ponce Pilate d’ANNE Bernet . Au-delà de ces indices d’importance, le voile ne sera pas levé davantage sur le livre, bible non clandestine qui, d’un bout à l’autre comptera autant d’initiés que d’adversaires.

Toute la vie peut s’écouler sans que l’on ne tombe jamais sur le livre aux effets extraordinaires qui bouleverserait notre existence. Certains lecteurs en rêvent comme du Graal ; d’autres, les plus rares, recherchent la perle.

L’auteur du drame en trois actes « PONCE PILATE » est de ceux là. On tombe sous l’empire d’un ouvrage qu’on se met à relire sans cesse, presque à recopier.  Ce livre peut ouvrir les portes d’un double labyrinthe, celui d’un amour non réciproque (est-on croyant ou non, insensible à la passion du Christ ? ) et celui d’un salvateur que le narrateur-auteur sillonnera au cours de son existence dans ses recherches et maintenant encore avec son drame en 3 actes qu’il vient de publier en quête de La vérité.

De ce livre ensorceleur, longtemps on ignorera toute la substance, comme la réalité de notre existence jusqu’à ce que le voile se lève quelque peu : il sera question du jugement de Jésus de Nazareth qu’Alain Didier cherchera dès lors à apercevoir dans sa propre vie, où qu’il aille, en chrétien de conviction.

De ce livre-opium, on découvre un jour l’auteur, un juriste qui pour répondre aux questions qu’il se pose se hisse au sommet de l’art dramatique, comme au  travers d’un rendez-vous théâtral.

Alain Didier répondra toujours aux questions posées :

En prononçant l’arrêt fatal, Pilate a-t-il été un agent conscient du rachat du genre humain ? Là, encore,  Alain Didier dira qu’il ne l’a pas été davantage que Juda s ou que les minoritaires du Sanhédrin quoiqu’échafaude, à leur sujet, Eric-Emmanuël Schmitt. (Lire * en bas). Une fatalité mécanique vient seule justifier l’acte violent et obstiné de ces êtres au lendemain du Sabbat qui se sentent toujours en danger de mort. Le Christ a été assassiné. Le mépris de l’auteur pour toute explication psychologique se comprend alors fort bien. Sa Foi est, bien sûr un don de Dieu auquel il s’est efforcé de correspondre en proposant cette représentation des fondements mêmes du christianisme au travers de son drame en trois actes.

Comment un livre parvient à envoûter, comment les mots exercent un pouvoir tyrannique.  Alain Didier le montre de manière aussi forte que nuancée. Les bouleversements ne seront pas les mêmes selon les lecteurs qui en deviennent les «adeptes» et croient dans le livre et les autres ;  mais en fin de compte, il les conduit tous à la même issue fatale : l’arrestation de Jésus de Nazareth par des soldats, le couronnement d’épines, la condamnation du Christ, inscription INRI, l’assassinat et la résurrection de Jésus.

Relater avec précision ce drame reviendrait à déambuler dans un labyrinthe, à croiser sans cesse les mêmes pensées ainsi que Marie-Madeleine « qui baigna de parfum son cadavre pâli, à l’aube de ce jour, je voulus être sûre qu’il ne manquait de rien » … Alain Didier ranime et exacerbe dans  « Ponce Pilate » des obsessions déjà présentes dans de nombreux ouvrages existants.

A force de traquer un livre qui vous échappe pareil à un vaisseau lointain, inaccessible à tous, étincelant de toutes ses amarres qui s’éloigne du rivage pour se perdre,  Alain Didier, sans le vouloir peut avouer aussi son échec. Pourquoi pas ? Il existe tant de choses qu’on ne sait pas.  Où est la vérité ?

Le labyrinthe l’aura mené très loin ou nulle part sinon à ses propres interrogations mais il se garde bien d’en conclure que la vérité se trouve dans son ouvrage, il laisse son libre-arbitre à  tout un chacun qui le lira.  Un retournement dans les deux sens car il peut aussi vous rétorquer : absence de preuve n’est pas preuve de l’absence.

Où est la vérité de l’au-delà ? Reste la puissance des mots, le pouvoir d’attraction qu’exerce l’écrit, et le style imagé grâce auquel l’auteur-narrateur se met à distance de temps à autre….

Bonne lecture à Vous.

A suivre

(*) graal ou Saint-Graal : vase sacré qui, selon la légende servit à la Cène, et qui recueillit le sang du Christ.

(*) Cet auteur reprend la thèse gnostique dite de « l’Evangile de Judas » faisant de celui-ci le plus fidèle disciple du Christ, à la fois assez intelligent pour entrer dans la dynamique réparatrice et assez discipliné pour livrer son maître son ordre. Quant aux seconds, il les associe au vote de mort du Sanhédrin, eux seuls ayant compris ce qui allait s’ensuivre.


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